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Le Figaro - 13/06/2024

«Briser le silence par l’écrit» : des boîtes aux lettres pour libérer la parole des enfants victimes de violences


Par Paloma Auzeau

Publié hier à 17:29, mis à jour hier à 17:29


Ce dispositif, créé en 2020 par l’association Les Papillons se développe progressivement dans l’ensemble des écoles du pays. Grâce à ces boîtes, un premier procès pour inceste se tiendra en septembre prochain dans l’Ain.


Un mot pour mettre fin à sa douleur. Lily n’a que 10 ans lorsqu’elle dépose dans cette boîte installée dans son école primaire, un vendredi de juin 2022, sa lettre pour dénoncer les violences incestueuses qu’elle subit depuis des années de la part de son grand-père. «Il mettait sa partie du bas à lui dans ma partie du bas à moi», écrit-elle avec ses mots d’enfants dans cette lettre récupérée par l'association Les Papillons.


Un signalement au procureur est fait le jour même par les membres de l’association. L’enquête démarre le lundi. Le mardi, des cousines de Lily, âgées de 17 et 15 ans reconnaissent également avoir été victimes de viols et d'agressions sexuelles de la part du même grand-père. Il est interpellé le mercredi et placé en détention provisoire. Son procès se tiendra en septembre 2024 devant la cour criminelle de l'Ain pour viols et agressions sexuelles.


Exprimer l’indicible

Tout ceci n’aurait pu arriver sans l’existence de ces boîtes aux lettres. «C'est cette boîte aux lettres qui a tout changé. Ça a sauvé ma fille. Sans ça, je ne sais pas où on en serait», avait réagi la mère de Lily auprès des Papillons. Ce dispositif, imaginé et créé par Laurent Boyet, le président fondateur de l’association Les Papillons, existe depuis 2020 et cherche «à permettre la libération de la parole des enfants vis-à-vis de toutes les violences qu’ils peuvent subir à l’école ou au domicile», explique-t-il. En 2023, environ 160.000 enfants en France ont été victimes d'inceste ou de violences sexuelles, selon les estimations de la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise). Cette même commission avait mis en lumière les difficultés des enfants victimes à témoigner, en raison de la honte, de la peur de ne pas être crus et de la crainte des représailles de la part de leurs agresseurs.


«Nous voulons briser ce silence par l’écrit», assène Laurent Boyet. En quatre ans, près de 300 boîtes aux lettres ont été installées par l’association dans les écoles ou lieux sportifs et de loisirs que fréquentent les enfants. Les témoignages sont récupérés plusieurs fois par semaine par des policiers municipaux, des «personnes de confiance», et sont transmis aux psychologues de l’association. Après enquête, les lettres les plus inquiétantes font l’objet d’un signalement au procureur. Un prérequis reste toutefois nécessaire : aucun témoignage ne doit être anonyme afin de pouvoir retrouver rapidement l’enfant en danger.


Chaque année, environ 30.000 lettres sont traitées par l’association. 50% d’entre elles y dénoncent du harcèlement scolaire, 22% des violences physiques et 13% des violences sexuelles intrafamiliale. La moyenne d’âge des enfants qui témoignent est de 7 ans. «Un très jeune âge», admet Laurent Boyet qui explique que ces jeunes enfants «n’auront pas le réflexe ou la possibilité d’appeler la ligne 119, Allô enfance en danger, pour se confier». Les boîtes aux lettres ont donc le mérite de répondre à cette problématique en permettant aux enfants d'exprimer l'indicible avec la certitude d'être écoutés. «Si tu ne peux pas le dire, écris-le», est-il inscrit sur la boîte.


«Diabolisés»

Ce dispositif qui s’installe petit à petit dans la communauté éducative a néanmoins été perçu, à ses débuts, d’un mauvais œil par le ministère de l’Éducation nationale. «On a très longtemps été diabolisés, raconte Laurent Boyet. Leur crainte principale était que ces lettres allaient accuser sans preuve des enseignants ou alors pointer du doigt les établissements qui faisaient mal leur travail», poursuit-il. De fait, l’association n’a toujours pas reçu d’agrément national de la part du ministère, un gage de qualité et de fiabilité pour les associations qui souhaitent collaborer avec les établissements scolaires.


Contacté par Le Figaro, le ministère de l’Éducation nationale explique que le projet présenté en 2023 «ne correspond pas au cadre du ministère en matière de prévention des violences et plus particulièrement des violences sexuelles» puisque celui-ci se «limite au recueil, via des boîtes aux lettres, de situations préoccupantes d'élèves et ne peut garantir le traitement des situations déposées». Le ministère rappelle que «le but des interventions des associations en milieu scolaire est de dispenser, en coconstruction avec l'équipe pédagogique, des actions éducatives et non de venir recueillir la parole de potentielles victimes.» Les syndicats de parents d’élèves se montrent également prudents face à ces boîtes aux lettres. «C’est un dispositif qui semble intéressant mais qui doit être cadré et mené par des experts qualifiés», souligne-t-on du côté de la FCPE et de la PEEP.


Depuis, l’association de Laurent Boyet et le ministère travaillent ensemble pour que Les Papillons s’intègrent au réseau de la Direction générale de l’enseignement scolaire, qui est notamment responsable de la politique de prévention des violences en milieu scolaire.


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